Formation continue en architecture : une habitude à prendre

Publié le 14 mai 2010 par Typhanie B

Article paru en 2007 sur Focus Carrière

Réunis en Conseil National, l’Ordre des Architectes et les Présidents des Conseils de Région se sont déclarés favorables à la formation continue obligatoire. Après adaptation de l’appareil de formation, les représentants de la profession souhaitent voir s’installer une véritable « culture de la formation ».

Le Conseil National de l’Ordre des Architectes (CNOA) a décidé, à l’unanimité, que la formation continue était un principe non seulement nécessaire à la profession mais surtout obligatoire. Il y quelques semaines, les présidents des Conseils régionaux se réunissaient pour discuter d’un renforcement du code déontologique en matière de formation. « La formation professionnelle tout au long de la vie constitue une obligation nationale » instaure la loi du 4 mai 2004. Mais, selon Laurence Croslard, vice-présidente du Conseil National de l’Ordre des Architectes, ce principe manque « de précisions et de moyens de contrôle ».

Basé sur le modèle britannique, l’Ordre des architectes veut promouvoir « une démarche fondée sur l’engagement personnel et la liberté de choix du parcours de formation ». Les architectes seront désormais invités, chaque année, au mois de mars, à remplir une « feuille d’engagements ». Le CNOA souhaite voir les architectes s’impliquer dans la formation à raison d’une quarantaine d’heures par an, dont vingt se dérouleraient sous forme de face à face pédagogiques, et vingt autres sous forme de colloques, salons ou lectures.

Les modalités de la formation continue obligatoire ne sont pas encore aujourd’hui établies avec exactitude et dans les détails, mais la profession s’orienterait vers un système à points. Chaque architecte aurait à répartir entre 35 et 40 points sur un minimum de 2 jours par an. Une vingtaine de points serait par exemple consacrée à la mise à jour des réglementations, et cela sous forme de séminaires.

Créer l’habitude

Tout architecte, expérimenté ou jeune diplômé, est conscient de l’importance de la formation. Or, comme l’indique l’expression « formation tout au long de la vie », une grande partie de la profession considère suffisants les apprentissages de tous les jours, sur le lieu de travail, et la lecture de revues spécialisées. Un choix honorable, mais difficilement contrôlable. « Ce qui leur manque, c’est l’habitude », remarque Laurence Croslard. Dans ce contexte, une expérience est menée, depuis 4 ans, dans un centre de formation en Bretagne, auquel Laurence Croslard est rattachée. Frais sortis de l’école et directement jetés dans l’arène professionnelle, les jeunes architectes bretons sont encouragés à suivre une journée de formation par mois. Pris au berceau, ils conservent par la suite l’habitude de se réunir. « Les architectes sont souvent très dispersés sur le territoire, voire isolés. Organiser des formations, c’est le moyen pour eux de se constituer un mini réseau, et surtout de ne plus hésiter à décrocher le téléphone pour prendre contact avec d’autres architectes », souligne Laurence Croslard.

Créer son entreprise

L’objectif d’un tel renforcement du caractère obligatoire de la formation continue n’est pas une incitation à « monter son affaire ». A peine sortis des bancs de l’école, les jeunes architectes n’ont pas, entre leurs mains, les moyens de s’installer à leur compte. « Ils n’ont, déclare Laurence Croslard, aucune connaissance en matière de gestion d’entreprise ou de gestion des contrats de travail ».

L’ONISEP évalue la part d’architectes exerçant en libéral à 70%. L’Ordre des Architectes en compte 57%. Dans les deux cas, les libéraux sont en majorité, ce qui accentue la nécessité pour les jeunes diplômés d’être formés en matière de management. Si l’Ecole en fait de bons concepteurs, elle les laisse vierges de toutes notions de montage d’opérations. Remplir une facture, des documents fiscaux, s’adresser au Maître d’œuvre, « ça ne s’apprend pas dans les livres, ironise Laurence Croslard. Les Ecoles ne forment pas au métier, mais à l’Architecture ». Avouant cela, elle-même d’ailleurs regrette ne pas avoir appris plus tôt à gérer une agence. « J’ai récemment suivi une formation Qualité, dit-elle, et ce n’est qu’à cette occasion que j’ai remis mon agence en question. Il aurait été si simple de le savoir dès le début ». Et nombre de jeunes diplômés lui ont fait la même remarque.

Aide financière

Pour 900 € TTC, le CFAA de Bordeaux propose par exemple 5 modules de deux jours, de mars à juillet 2007, qui viennent s’inscrire dans le cycle « Jeunes Inscrits ». Objectif : « le passage de la formation initiale à l’exercice professionnel ». Réservée aux architectes en exercice depuis moins de 5 ans, cette formation s’adresse en particulier aux jeunes diplômés souhaitant s’installer comme maître d’œuvre, ou récemment installés. D’autres formations, ponctuelles et moins onéreuses, viennent s’ajouter à ces cycles. A Rennes par exemple, le 15 juin 2007, est organisée une journée de formation autour de la norme NFP 03 001 : Assurance responsabilité et devoir de conseil.

Le chemin de la vie professionnelle est semé d’embûches administratives, que les jeunes architectes _ par jeunes, il faut entendre récemment diplômés _ doivent apprendre à surmonter. Et pour les aider, le CNOA s’est engagé à donner des subventions aux Régions qui le souhaitent. Améliorer ainsi l’appareil de formation et des financements permet d’instaurer des « tarifs jeunes ». Ne sont concernées que les formations dont la durée n’est pas inférieure à 10 jours par an. « Il faut une continuité. Si les rendez-vous sont ponctuels, aucun réseau ne sera mis en place, et c’est là tout l’intérêt de rendre la formation continue obligatoire », insiste Laurence Croslard. Pour un coût d’environ 1000 €, 500 sont pris en charge par la Région, et l’autre partie par le FIF-PL. Concrètement, le jeune architecte ne sortira de sa poche qu’une cinquantaine d’euros pas jour.